Depuis 2018, les États-Unis ont engagé une guerre commerciale, notamment contre la Chine, sous l’impulsion de Donald Trump. Le but affiché était simple : rééquilibrer la balance commerciale et « ramener les emplois » aux États-Unis. Mais six ans plus tard, force est de constater que cette politique, bien que politiquement efficace dans certains cercles, n’a pas atteint ses objectifs économiques.
1. Le déficit commercial américain n’a pas diminué
Malgré les tarifs douaniers imposés depuis 2018, le déficit commercial des États-Unis a continué à croître, atteignant des niveaux record en 2022. Le déficit n’a baissé en 2024 qu’en raison d’un ralentissement économique global. Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
– 2016 (avant Trump) : ≈ 502 Md$
– 2019 (pendant les premiers tarifs) : ≈ 576 Md$
– 2022 (après COVID + relance massive) : ≈ 945 Md$
– 2024 (avant Trump 2) : ≈ 785 Md$
J’encourage la lecture de l’article suivant: https://www.bbc.com/afrique/articles/cy9lg74l5epo
2. Pourquoi les tarifs douaniers ne rééquilibrent pas une balance commerciale
L’idée que les droits de douane permettent mécaniquement de corriger un déficit commercial repose sur une série de malentendus économiques fondamentaux :
– Taxer les importations réduit aussi les exportations en raison des représailles étrangères.
– Les produits étrangers ne peuvent pas toujours être remplacés : soit parce qu’il n’existe pas d’alternative nationale, soit parce qu’elle est plus chère.
– Les recettes douanières sont un prélèvement interne, pas un enrichissement national.
– Un déficit commercial n’est pas forcément un problème : il peut être le reflet d’une croissance forte ou d’un système monétaire mondial.
3. Exemples concrets d’échec
• Acier et aluminium : les tarifs ont protégé quelques producteurs américains, mais fait grimper les prix dans l’automobile et la construction. Les pertes d’emplois ont parfois dépassé les gains.
• Apple : en 2025, l’entreprise a annoncé avoir payé 1,1 milliard de dollars en droits de douane. Ces coûts sont supportés par Apple, ses actionnaires et ses clients américains — pas par la Chine.
4. Le paradoxe politique
Les électeurs de la Rust Belt applaudissent les taxes douanières au nom du patriotisme économique. Pourtant, ce sont eux qui en subissent le plus directement les effets : hausse des prix, pas de relocalisations massives, baisse du pouvoir d’achat. Le storytelling politique l’emporte sur la réalité économique.
Conclusion
Le rééquilibrage de la balance commerciale n’a pas eu lieu. Les droits de douane ont eu un impact limité, souvent contre-productif, et les déficits restent massifs. L’Amérique ne s’est pas enrichie, elle s’est taxée elle-même. Mais le mythe fonctionne encore : celui d’une Amérique forte qui reprend le contrôle, quitte à en payer le prix — surtout pour les plus modestes.