De Hitler à Poutine et Trump : l’obsession du territoire et du pouvoir sans limite

Derrière les discours de grandeur nationale, de protection du peuple ou de retour à une supposée légitimité historique, se cache une même obsession : celle de l’expansion territoriale et du pouvoir sans fin. De Hitler à Poutine en passant par Trump, certains dirigeants rejouent une vieille partition impérialiste, quitte à réécrire l’histoire et piétiner les droits des autres nations.

Le « Lebensraum » : un précédent idéologique meurtrier

Adolf Hitler, dans Mein Kampf, développe la notion d’espace vital (Lebensraum) comme fondement de la politique allemande. Ce projet visait l’extension vers l’Est (Ukraine, Pologne, Russie) pour offrir terres et ressources à la race dite « aryenne ». Il s’accompagnait d’un mépris absolu des peuples considérés comme « inférieurs » et justifiait la guerre d’extermination.

Cette idée d’expansion territoriale au nom d’un destin historique ou racial a profondément marqué le XXe siècle, et continue d’inspirer, sous des formes différentes, des discours actuels.

Vladimir Poutine : restaurer l’empire au nom de la Russie éternelle

Poutine n’emploie pas le mot Lebensraum, mais sa logique s’en approche :

  • 2008 : guerre contre la Géorgie (Abkhazie, Ossétie du Sud).
  • 2014 : annexion de la Crimée, guerre dans le Donbass.
  • 2022 : invasion de l’Ukraine.

Son discours révisionniste affirme que l’Ukraine n’a pas d’existence propre, qu’elle appartient à la Russie, et que l’OTAN viole l’espace russe. Il suggère même parfois que les États baltes ou la Finlande pourraient un jour « revenir » dans l’orbite russe.
Poutine utilise la mémoire de la Seconde Guerre mondiale pour justifier une politique expansionniste, inversant les rôles : l’agresseur se prétend menacé.

Donald Trump : fantasmes d’annexion et rêve d’éternité

Donald Trump, quant à lui, ne dispose ni de la même constance stratégique que Poutine ni du même pouvoir absolu. Mais ses sorties sont révélatrices :

  • Il a proposé d’acheter le Groenland au Danemark en 2019, idée moquée mais sérieuse à ses yeux.
  • Il a continué à évoquer l’annexion du Canada comme 51ᵉ État des États-Unis après son investiture de 2025.
  • Il parle régulièrement d’un second mandat « comme jamais vu dans l’histoire » et laisse planer l’idée d’un troisième mandat, malgré l’interdiction constitutionnelle.

Lors d’un discours au Texas en mars 2025, Trump déclarait : « Le Canada ? C’est un beau pays. Il devrait être à nous, il l’est déjà dans nos cœurs. »
De son côté, Vladimir Poutine déclarait encore en février 2024 : « La Russie n’envahit pas, elle réintègre les peuples russes dans leur foyer naturel. »

Une constante : la nostalgie comme carburant du pouvoir

Ces trois figures politiques ont en commun un usage mythique du passé :

  • Hitler parlait d’un Reich millénaire, trahi par Versailles.
  • Poutine regrette la puissance soviétique et l’empire tsariste.
  • Trump invoque un passé idéalisé où l’Amérique dominait sans partage, « Make America Great Again ».

Leurs discours suivent un même schéma :

  • Désigner des ennemis intérieurs ou extérieurs.
  • Présenter la nation comme victime.
  • Promettre le retour à une grandeur perdue… par tous les moyens nécessaires.

L’ombre portée de l’impérialisme autoritaire

Ce parallèle ne signifie pas que Trump est Hitler, ou que Poutine prépare un génocide. Mais ils illustrent tous les trois une dérive commune :

  • La volonté de dépasser les règles du droit international.
  • Le mépris des nations voisines.
  • Le rejet de toute limite institutionnelle.

Dans un monde où les crises (climatiques, économiques, identitaires) alimentent les angoisses collectives, ces discours de conquête peuvent séduire. C’est là le vrai danger : la banalisation d’idées autoritaires, habillées d’un patriotisme creux mais efficace.

Poutine, les russophones et l’ombre des Sudètes

L’un des discours les plus révélateurs de Vladimir Poutine a été prononcé le 18 mars 2014, au Kremlin, à l’occasion de la signature du traité d’annexion de la Crimée. Il y déclarait :

Cette formulation exprime clairement la vision de Poutine : les territoires de l’ex-URSS dans lesquels vivent des communautés russophones seraient, de fait, des espaces « historiquement russes » qu’il conviendrait de réintégrer. Ce discours a été réitéré en 2022 pour justifier l’invasion de l’Ukraine, avec la rhétorique de la protection des populations russophones du Donbass.

Cette justification repose sur un principe ethno-linguistique, qui rappelle de manière troublante l’argumentation utilisée par Adolf Hitler en 1938, lorsqu’il revendiquait l’annexion des Sudètes en Tchécoslovaquie au motif qu’ils étaient peuplés d’Allemands ethniques. Un an plus tôt, il avait obtenu l’Anschluss avec l’Autriche, en prétendant qu’il ne faisait que réunifier deux peuples naturellement liés.

Dans les deux cas, le glissement est le même :

  • Une population parlant la langue du pays voisin est proclamée « opprimée » ou « menacée ».
  • L’État voisin s’érige en « protecteur ».
  • Puis, cette protection se transforme en intervention militaire, référendum illégitime, ou annexion unilatérale.

La communauté internationale a largement dénoncé cette logique, estimant qu’elle constitue une violation flagrante du droit international, du principe de souveraineté des États et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Mais dans la logique de Poutine, c’est l’histoire impériale de la Russie — tsariste ou soviétique — qui prime sur les frontières actuelles.

Ce type de discours crée une insécurité durable dans l’ensemble de l’ancien espace soviétique, en particulier pour les États baltes, la Moldavie ou le Kazakhstan, qui abritent eux aussi des minorités russophones.