1. Les origines : la France face au plan de partage de 1947
En 1947, l’Assemblée générale des Nations unies adopte la résolution 181, prévoyant la création de deux États — un juif, un arabe — sur le territoire de la Palestine mandataire.
– La France vote pour cette résolution, mais sans rôle moteur.
– L’État d’Israël est proclamé en mai 1948. La France reconnaît de facto Israël la même année, puis de jure en janvier 1949.
À l’époque, la cause palestinienne est marginale dans la diplomatie française, focalisée sur la décolonisation en Afrique du Nord.
2. 1967–1980 : vers une position équilibrée mais prudente
La guerre des Six Jours (1967) et l’occupation de Gaza, de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est par Israël posent la question palestinienne de manière plus aiguë.
– Charles de Gaulle condamne l’occupation israélienne et appelle à un retrait des territoires conquis.
– La France soutient alors le principe de deux États, sans reconnaître pour autant l’OLP ni un État palestinien inexistant juridiquement.
En 1979, l’accord de Camp David entre Israël et l’Égypte marque un tournant diplomatique au Proche-Orient. La France, à travers la déclaration de Venise (1980) avec les 9 de la CEE, reconnaît le droit des Palestiniens à l’autodétermination.
3. 1982 : le discours historique de Mitterrand à la Knesset
Le 4 mars 1982, François Mitterrand prononce un discours à la Knesset (Parlement israélien) :
« Le droit à la sécurité pour Israël implique aussi le droit pour les Palestiniens à un État. »
Ce discours marque la première reconnaissance politique française du principe d’un État palestinien, mais sans acte juridique.
Peu après, la France accepte d’accueillir Yasser Arafat à Paris, en tant que chef de l’OLP.
4. 1988–2000 : dialogue renforcé mais pas de reconnaissance
– En novembre 1988, l’OLP proclame à Alger l’État de Palestine. La France ne reconnaît pas cet État, mais ouvre un dialogue officiel avec l’OLP, reconnue comme représentante légitime du peuple palestinien.
– Dans les années 1990, la France soutient le processus d’Oslo, qui vise à instaurer un État palestinien négocié avec Israël.
Mais après l’échec des négociations de Camp David (2000) et la seconde Intifada, le processus s’effondre, et la position française se fige : soutien à deux États, mais pas de reconnaissance unilatérale.
5. 2011–2014 : soutien à la Palestine à l’ONU, sans aller jusqu’à la reconnaissance bilatérale
– En 2011, la France soutient l’adhésion de la Palestine à l’UNESCO.
– En 2012, elle vote pour l’octroi du statut d’État observateur non membre à la Palestine à l’ONU.
– En 2014, l’Assemblée nationale puis le Sénat votent des résolutions non contraignantes appelant à la reconnaissance de la Palestine. Mais François Hollande, alors président, n’agit pas, estimant qu’il faut une dynamique de paix.
6. 2017–2023 : prudence stratégique d’Emmanuel Macron
Emmanuel Macron, élu en 2017, confirme la ligne traditionnelle : pas de reconnaissance unilatérale, mais soutien indéfectible à une solution négociée.
Il critique régulièrement la colonisation israélienne et les blocages du processus de paix, mais refuse de rompre avec les États-Unis ou Israël sur ce dossier.
7. 2025 : l’acte de reconnaissance
Le 24 juillet 2025, Emmanuel Macron annonce que la France reconnaîtra officiellement l’État palestinien en septembre 2025.
Cette décision s’inscrit dans un double contexte :
– L’impasse diplomatique après l’échec des trêves humanitaires à Gaza.
– Le discrédit croissant du statu quo entretenu par les puissances extérieures, notamment les États-Unis.
C’est une première historique : la France passe de la position de principe à l’acte diplomatique, en rupture avec des décennies d’attentisme.
Conclusion : une lente évolution enfin concrétisée
| Période | Position française |
| 1947–1980 | Soutien au plan de partage, mais neutralité active |
| 1980–1988 | Reconnaissance du droit palestinien à un État |
| 1988–2000 | Dialogue avec l’OLP, sans reconnaissance |
| 2000–2014 | Soutien à deux États, soutien onusien, blocage bilatéral |
| 2017–2023 | Prudence, volonté de ne pas isoler la France |
| 2025 | Reconnaissance officielle annoncée |
Annexe : Reconnaissance de l’État palestinien en Europe (2025)
| Pays ayant reconnu l’État palestinien | Pays ne l’ayant pas reconnu |
| Suède (2014) | Allemagne |
| Espagne (2024) | Italie |
| Irlande (2024) | Royaume-Uni |
| Norvège (2024) | Pays-Bas |
| Slovénie (2024) | Danemark |
| Portugal | Belgique |
| Chypre | Grèce |
| Malte | Autriche |
| Hongrie | Croatie |
| Pologne | Lettonie |
| Slovaquie | Estonie |
| République tchèque | Lituanie |
| Roumanie | Luxembourg |
| Bulgarie | Finlande |
| Serbie | |
| Bosnie-Herzégovine | |
| Monténégro | |
| Albanie | |
| Islande | |
| France (sept. 2025) |