La France s’endette pour préserver un modèle social né dans l’enthousiasme des années d’après-guerre. Mais dans un monde plus mobile, plus concurrentiel, et démographiquement plus vieux, continuer à faire « comme avant » devient de moins en moins viable. L’appel à la lutte contre les inégalités masque souvent une perception faussée du réel.
L’héritage d’un autre temps
Les grandes conquêtes sociales du XXe siècle (Front Populaire, CNR, Trente Glorieuses) ont été pensées dans un monde où :
- La croissance était forte ;
- La population jeune et le plein-emploi faisaient consensus ;
- Le capital était peu mobile, et la nation tenait lieu de cadre naturel.
Or, ces systèmes ont été figés — au nom du droit, de la justice, ou du confort électoral — alors que le monde, lui, a changé :
- Globalisation ;
- Transition démographique ;
- Concurrence fiscale et technologique.
La dette comme symptôme d’un refus de réformer
La dette française n’explose pas seulement à cause des crises (Gilets Jaunes, Covid, Ukraine), mais surtout parce que le système n’a pas été adapté ; les promesses d’hier sont toujours servies… à crédit.
Les tentatives de réforme sont soit tardives, soit timorées, soit brutalement rejetées (retraites, allocations chômage, fonction publique…).
Inégalités : perception et réalité
La France reste l’un des pays les plus redistributifs au monde :
- Le taux de pauvreté après redistribution tombe à environ 13 %, contre environ 26 % avant (INSEE).
- Le coefficient de Gini passe de ~0,46 à ~0,29 après impôts et prestations.
Mais la perception des inégalités est biaisée :
- Chacun se compare à son voisin, pas à Bernard Arnault.
- L’envie sociale reste un moteur puissant, mais pas toujours juste.
Enfin, l’illusion d’une taxation des ultra-riches comme solution miracle est souvent contre-productive :
- Les 0,1 % les plus riches peuvent déplacer leur résidence, leur capital, ou leur entreprise ;
- Une fiscalité punitive devient inefficace sans coordination internationale.
Conclusion : Le modèle social français entre nostalgie et aveuglement
La France continue de défendre des droits sociaux conçus dans un autre siècle, pour une autre société. L’endettement permet de retarder la douleur de l’ajustement… mais pas de l’éviter.
Ce n’est pas l’injustice qui alimente la colère, c’est la comparaison permanente. Et quand la dette masque les vrais débats, la lucidité devient un acte de résistance.
« Ce n’est pas l’injustice qui alimente la colère, c’est la comparaison permanente. »
Évolution de la dette publique française (2017–2024)

Les aides aux entreprises et aux ménages : loin des 910 Md€
Voici une estimation cumulative des principaux postes de dépenses exceptionnelles ou structurelles sous les deux quinquennats de Macron. Même en additionnant ces montants, on reste en deçà des 910 milliards d’euros de dette accumulée entre 2017 et 2024.
| Poste de dépense | Coût estimé (Md€) |
| Crise des Gilets Jaunes (2018–2020) | ≈ 10 |
| Crise Covid (2020–2022) | ≈ 325 (y compris pertes fiscales) |
| Bouclier énergétique + Ukraine (2022–2023) | ≈ 100 à 120 |
| Réformes fiscales (ISF, taxe d’habitation) | ≈ 140 sur 7 ans |
| Aides aux entreprises (PGE, CICE, etc.) | ≈ 150 |
| Total estimé cumulatif | ≈ 725 |
→ Il manque donc environ 180 à 200 Md€ pour atteindre les 910 Md€, ce qui correspond à un déficit structurel non résorbé (dépenses supérieures aux recettes année après année).