Cette note vise à structurer une réflexion à contre-courant du récit dominant sur Emmanuel Macron. Loin de la figure caricaturale de « président des riches » ou d’élite déconnectée, il apparaît pour certains comme un dirigeant profondément lucide, technocrate éclairé, mais en décalage avec une époque saturée d’émotions, de ressentiments et de rejets affectifs.
1. Un diagnostic très proche de la réalité sociale
Dès 2016 dans *Révolution*, Macron identifie les fractures françaises majeures : territoriales (centre vs périphérie), sociales (rente vs travail), éducatives, économiques, et politiques (perte de confiance, rejet de la verticalité). Il adopte une lecture structurelle des problèmes, plutôt qu’émotionnelle ou culpabilisante.
2. Une pensée enracinée dans l’expérience du réel
Macron n’est pas un homme d’appareil classique. Il a été banquier, haut fonctionnaire, et philosophe de formation. Il connaît les rouages du système et les limites de son inertie. Il a tenté de faire bouger les lignes sans crier ni flatter, mais par réformes concrètes (apprentissage, code du travail, fiscalité de l’innovation).
3. Pourquoi ce rejet massif alors ?
Parce qu’il rompt avec le récit affectif traditionnel : ni tribun ni protecteur, ni bon père ni militant. Son ton professoral, analytique, est perçu comme méprisant. La culture politique française reste attachée à des figures sentimentales ou clivantes.
4. Un échec non de gouvernance mais de perception
Macron est haï pour son style, pas pour ses résultats. Ses réformes sont jugées froides, pourtant elles ont modernisé plusieurs secteurs clés. Mais la démocratie médiatique étant fondée sur le ressenti, il est disqualifié à travers une grille émotionnelle.
5. Une lecture philosophique : Macron face à Arendt
Hannah Arendt écrivait : « La vérité de fait est politique dans son essence, car elle est toujours exposée au pouvoir. » Macron semble incarner cette tension : il tente d’imposer la rationalité des faits dans un environnement saturé de storytelling et de ressentiment. Il devient l’incarnation d’un pouvoir rationnel à une époque irrationnelle.
Conclusion
De mon point de vue, cette position, bien que minoritaire, repose sur une lecture cohérente et exigeante du réel. Elle mérite d’être défendue avec rigueur et sérénité, même si elle va à l’encontre des émotions dominantes.
Vérité et perception
« La vérité de fait est politique dans son essence, car elle est toujours exposée au pouvoir. »
Hannah Arendt« Ce que je veux, c’est que nous redevenions une Nation de bâtisseurs. »
Emmanuel Macron – Discours de 2017
Comprendre la trajectoire Macron : cohérence, crise, et crise de perception
1. Le « quoi qu’il en coûte » n’était pas une rupture, mais une continuité logique
La politique de l’offre visait à renforcer l’économie par les entreprises. Or, la pandémie stoppait net la production, l’investissement, et menaçait des milliers de faillites. Sans soutien massif, le chômage aurait explosé, annulant en quelques mois les résultats de 2018–2019.
Ce n’est donc pas une contradiction, mais un acte de cohérence stratégique : sauver le tissu économique pour préserver la capacité à relancer l’offre ensuite.
Le soutien de l’État a permis :
– De maintenir partiellement l’emploi (activité partielle),
– De soutenir la consommation (fonds de solidarité),
– De préserver les investissements dans certains secteurs (industrie, numérique, écologie).
2. Le pouvoir d’achat a augmenté en moyenne sur la période 2017–2022
Malgré le sentiment d’appauvrissement, les chiffres disent autre chose :
| Année | Évolution du pouvoir d’achat par UC (Insee) |
| 2017 | +1,4 % |
| 2018 | +0,7 % |
| 2019 | +1,8 % |
| 2020 | +1,2 % |
| 2021 | +1,9 % |
| 2022 | +0,0 % |
→ Soit +7 % sur le quinquennat Macron I, sans hausse majeure d’impôts, et sans baisse nette des prestations sociales.
Les mesures ayant contribué à cela :
– Suppression de la taxe d’habitation,
– Revalorisation de la prime d’activité,
– Exonération partielle de cotisations sociales,
– Aides ponctuelles (inflation, énergie),
– Maintien des transferts sociaux.
3. Les Gilets jaunes, symptôme d’un trouble occidental plus vaste
Le parallèle avec le trumpisme est extrêmement juste : ce n’est pas un accident isolé, mais un symptôme transatlantique. Parmi les points communs :
– Perte de repères collectifs,
– Crise de légitimité des élites,
– Méfiance vis-à-vis des médias,
– Amplification algorithmique des discours de rejet,
– Surreprésentation numérique des extrêmes.
Spécificité française :
– État providence protecteur mais mal aimé,
– Extrêmes plus structurés (LFI, RN),
– Centralisation du pouvoir cristallisant le ressentiment sur l’exécutif.
Conclusion : Macron, cible idéale dans un monde désorienté
Il incarne l’effort rationnel, pro-européen, réformateur, mais agit dans une époque irrationnelle et émotionnelle.
Il a fait ce qu’un président cohérent pouvait faire face aux crises : soutien massif, sans sacrifier la logique de fond.
Il est pourtant perçu comme distant, technocrate, malgré des mesures sociales réelles.