J’ai longtemps cru — et je crois encore — à la rationalité comme fondement de l’action politique. Mais la rationalité n’est pas l’adhésion froide aux chiffres : elle suppose aussi l’anticipation du ressenti collectif, la pédagogie du temps long, la justice perçue. Les réformes de Macron ont été trop souvent techniquement justes mais politiquement aveugles. Le pouvoir ne se justifie pas par la seule compétence, il s’incarne aussi dans une forme d’humanité visible, de dialogue permanent avec la société.
1. Une rationalité sous tension
Le quinquennat d’Emmanuel Macron, porté par une volonté réformatrice assumée, s’est inscrit dans une logique de modernisation et d’efficacité économique. Cependant, plusieurs décisions majeures ont montré les limites d’une rationalité strictement technocratique, notamment en matière fiscale et sociale.
Mesures emblématiques et leurs paradoxes
| Mesure | Motivation initiale | Conséquence attendue | Limites et critiques |
| Suppression taxe d’habitation | Justice fiscale, pouvoir d’achat | + pouvoir d’achat pour 80 % des ménages | Perte d’autonomie des communes, dépendance accrue à l’État |
| Chèques énergie / carburant | Réponse aux Gilets Jaunes, inflation pétrolière | Soulagement temporaire des ménages modestes | Précipitation, non soutenable, pas de solution de fond |
2. Ce que la rationalité présidentielle a produit
| Aspect | Réussites rationnelles | Limites rationnelles |
| Vision | Modernisation de l’État, tech, compétitivité | Peu de pédagogie démocratique, sentiment technocratique |
| Méthode | Réformes préparées, appuyées sur des chiffres | Communication désastreuse, isolement politique |
| Fiscalité | Baisse impôt sociétés, flat tax, attractivité accrue | Image “pro riches”, manque de contreparties |
| Retraites | Diagnostic lucide sur la soutenabilité | Rejet massif, méthode verticale, mauvaise temporalité |
| Écologie | Relance du nucléaire, rénovation thermique | Manque de pilotage global, dépendance au pétrole maintenue |
Conclusion : La rationalité ne suffit plus
Une démocratie vivante ne peut se contenter de bonnes décisions sur le papier. Elle doit reposer sur un lien fort entre la logique des faits et l’intelligence des ressentis. Gouverner, c’est prévoir, mais c’est aussi entendre. Et parfois, pour convaincre, il faut savoir suspendre son raisonnement et rétablir une forme de résonance humaine.